par Astrid De Smet
Dès 2021, le ministre des finances a annoncé que les versements de rémunérations pour droits d'auteur feraient l'objet d'un contrôle actif. Une multitude de contrôles fiscaux et d'enquêtes s’en sont suivi, tant au niveau de l'impôt sur le revenu des personnes physiques que de l’imposition des sociétés. La possibilité de verser des droits d'auteur à l'avenir a été encore restreinte par l'introduction d'une nouvelle réglementation en date du 1er janvier 2023. Vous souhaitez continuer à profiter du régime fiscal avantageux en matière de droits d'auteur ? Dans ce cas, veillez bien à ce que vous respectiez toutes les restrictions fiscales et que votre contrat remplisse toutes les conditions que nous épinglons ci-dessous.
Pour un aperçu des règles fiscales qui fixent des limites quantitatives au montant maximal à verser en appliquant différents montants et pourcentages, nous vous renvoyons à l'article Les droits d'auteur après la réforme fiscale, publié précédemment. Par ailleurs, l'interprétation stricte du la notion d' « œuvre relevant des droits d'auteur » est la principale contrainte qui pèse sur les paiements compensatoires. Ces dernières années, ce concept a été interprété de façon large, ce qui a permis à des consultants en informatique, par exemple, de qualifier en droits d’auteur une partie de leurs services facturés. Pour y remédier, un recentrage sur l’essence du concept est en train d'intervenir: une œuvre n'est protégée par le droit d'auteur que si elle est le résultat d'une activité créative, qu'elle est mise en forme (elle doit être perceptible par les sens) et qu'elle est originale (elle doit refléter la personnalité ou l'esprit créatif de l'auteur).
L'application stricte de cette notion nous a fait craindre que les droits d'auteur soient limités aux secteurs évidents tels que l'art, la musique/les productions cinématographiques, les arts du spectacle, etc. Cependant, les audits ont montré que ces craintes étaient injustifiées et que dans des secteurs tels que les jeux de réalité virtuelle, le développement d'applications, la photographie de produits et la présentation vidéo, les rémunérations de droits d'auteur étaient toujours acceptées, pour autant que toutes les autres conditions soient remplies et, en particulier, que l'œuvre soit effectivement qualifiée de protégée par le droit d'auteur.
Pour justifier que votre travail est protégé par les droits d'auteur, décrivez clairement dans votre contrat ce que vous créez exactement, de sorte que l'on puisse déduire de cette description que votre travail remplit les conditions pour être protégé par les droits d'auteur. L’époque des descriptions vagues et générales est révolue. Vous n'êtes pas en mesure de définir des œuvres spécifiques répondant aux trois conditions décrites ci-dessus ? Dans ce cas, envisagez de ne plus verser de rémunérations au titre des droits d'auteur ou d'utiliser le régime transitoire progressif.
Dans un certain nombre de contrôles, le contrat actuel a été accepté pour le passé, mais des exigences supplémentaires ont été imposées pour l'avenir. Bien qu'aucune cohérence claire ne puisse encore être déduite, des points communs semblent en ressortir. L'un d'eux est l'application stricte des conditions de transfert des droits d'auteur qui sont en fait inscrites dans la loi depuis des années.
Tout d'abord, "à l'égard de l'auteur, tout contrat doit être prouvé par écrit". Sans contrat écrit, votre sort est scellé, car c'est l'une des premières questions qui vous sera posée systématiquement en cas de contrôle ou de demande d'informations.
La rémunération accordée en échange de la licence ou de la concession sur l'œuvre protégée par les droits d'auteur doit être proportionnelle au chiffre d'affaires, aux coûts et au bénéfice effectivement réalisés par l'œuvre. Il est donc conseillé d'inclure la formule de détermination de la rémunération dans l'accord, en utilisant autant que possible la terminologie de la législation fiscale. Certains contrôleurs sont même allés un pas plus loin en exigeant que, lors de la création de différents types d'œuvres, le contrat prévoie une répartition de la rémunération au prorata du temps consacré par l'auteur à chaque type d'œuvre. Par exemple, si un auteur consacre en moyenne 80 % de son temps de travail à la création (les 20 % restants étant consacrés à l'administration), dont 50 % à l'écriture de textes, 20 % à la création de dessins et 10 % à la composition de musique, la rémunération totale pour chacun de ces travaux doit être répartie dans la même proportion et figurer en tant que telle dans le contrat.
Par ailleurs, l'article XI.167 CDE prévoit que "La cession ou la licence des droits de propriété portant sur des œuvres futures n'a lieu que pour une durée limitée et dans la mesure où le genre d'œuvres sur lequel porte la cession ou la licence est déterminé". Un certain nombre de contrôles ont donc exigé que le contrat à durée indéterminée soit transformé en contrat à durée déterminée. Une durée de trois ans a été jugée acceptable. Détail intéressant : la reconduction tacite (et donc automatique) d'un contrat à durée déterminée n'a pas été acceptée, car elle équivaut en pratique à un contrat à durée indéterminée. L'accord ne peut envisager qu'un renouvellement explicite.
Les formes d'exploitation pour lesquelles l'œuvre peut être utilisée doivent également être clairement indiquées : "Pour chaque mode d'exploitation, la rémunération pour l'auteur, la portée et la durée de la cession ou de la licence doivent être expressément précisées". Auparavant, nous avons formulé ces exigences le plus largement possible afin de couvrir toutes les formes d'exploitation. Lors des contrôles, il nous a été exposé que seules les formes d'exploitation applicables dans ce contexte avaient lieu d’être incluses dans l'accord. Là encore, il nous semble qu'il s'agit d'une application correcte de ce qui figure déjà dans la loi. Les accords portant sur des formes d'exploitation encore inconnues sont exclus par définition.
Sur le plan juridique, la législation régissant les droits d'auteur n'a donc pas énormément changé. C'est surtout dans son application que l'administration fiscale semble adopter une position beaucoup plus stricte que par le passé. L'époque où l'administration fiscale se contentait d'un accord écrit contenant des dispositions (trop) générales semble définitivement révolue. Si vous devez encore payer des droits d'auteur à l'avenir, veillez à ce que votre contrat contienne suffisamment de détails et soit appliqué à votre situation spécifique. Accordez suffisamment d'attention à la description des différents types d'œuvres, aux formes d'exploitation, au calcul de la rémunération et à sa répartition entre les œuvres réalisées en fonction du temps que vous consacrez à chaque type d'œuvre.
Vous avez des questions à ce sujet? N'hésitez pas à contacter votre responsable de dossier.
Astrid De Smet
Tax & Legal astrid.desmet@vdl.be
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