Philippe De Craene a vendu sa concession Porsche

Philippe De Craene raconte l’histoire passionnée de « son » Porsche Centre. Il se rappelle encore parfaitement à quand remonte cette passion. « Mon engouement a commencé à l’âge de treize ans, plus précisément en juin 1969 », raconte-t-il. « Jacky Ickx venait de gagner les 24 heures du Mans avec sa GT40, avec douze secondes d’avance sur la Porsche 908 de Hans Hermann. Un moment resté gravé dans ma mémoire. Quelques années plus tard, à l’âge de 18 ans, j’achetai ma première Porsche, d’occasion bien évidemment. J’ai commencé à travailler dans l’entreprise de mon père, dans le secteur de la dentisterie, après mon service militaire. J’ai toutefois arrêté cette activité au bout de sept ans pour ouvrir un garage Porsche. Chassez le naturel, il revient au galop. Mon père m’a beaucoup aidé et m’a encouragé à élaborer un plan financier.

J’ai développé mon idée et mon étude de marché a révélé que 278 Porsche avaient été vendues dans toute la Belgique en 1986. Les vingt points de vente étaient tous des concessions VW-Audi vendant “accessoirement” des Porsche. Les volumes étaient vraiment limités : en 1986, dix-sept Porsche avaient été vendues à Gand, trois à Aalst et une à Ostende. Qu’importe, je ne voulais vendre que des Porsche. J’avais beau ne pas venir du secteur automobile, j’étais tout de même membre du Porsche Club belge depuis 1977 et je faisais partie de son conseil d’administration, grâce à quoi j’avais de bons contacts avec l’importateur. C’est lui qui s’est chargé de transmettre mon projet à l’usine Porsche. Heureusement, j’ignorais à cette époque que la marque traversait en fait une mauvaise passe. Après des mois d’attente, j’ai pu aller défendre mon projet à Ludwigsbourg. Ils ont été enthousiasmés par l’idée d’un petit jeune prêt à s’investir pour Porsche. Ils ont cru en moi et m’ont donné leur feu vert. C’est ainsi que j’ai eu le bonheur de pouvoir faire de ma passion mon métier. »

Philippe a même reçu l’autorisation d’ajouter « Carrera Motors » au nom officiel de « Porsche Centre East- Flanders » pour la durée de son exploitation. Il a donc commencé la construction de son garage à Laethem-Saint-Martin. « J’ai reçu carte blanche ; il n’y avait pas encore de directives à cette époque. C’était la première concession au monde à distribuer uniquement Porsche. J’ai vendu 17 voitures lors de ma participation au Salon de l’auto de 1987, autant que mon prédécesseur à Gand en une année. » Il a vendu 37 voitures au cours de la première année. À titre de comparaison : il en a vendu presque 520 en 2023.

Une croissance impressionnante, en partie due à l’évolution de la marque. « Les premières années, Porsche ne commercialisait que trois modèles, toutes des voitures de sport. La marque s’est rendu compte de l’énorme potentiel du marché des SUV, tant pour les clients existants que pour la nouvelle clientèle. La Cayenne a rencontré un succès retentissant dès son lancement en 2003. De nombreux nouveaux modèles se sont ensuite succédé : la Boxter, la Panamera, la Macan, les voitures hybrides et les modèles électriques. Ces développements sont l’oeuvre du centre R&D de Porsche, sans doute le plus important de tout le monde automobile. »

Une histoire de croissance, sans doute, avec toutefois ses hauts et ses bas, souligne Philippe. « Les défis ne manquaient pas, naturellement. Les premières directives spécifiques concernant l’identité de la concession ont fait leur apparition en 2003. Je venais de programmer une rénovation et j’ai dû apporter des modifications pour me conformer à ces nouvelles directives. Les rénovations de 2013 et 2023 ont également eu lieu selon les normes de Porsche. Près de la moitié des garages de notre pays ont disparu au cours de ces 15 à 20 dernières années. Et depuis dix ans, nous assistons à une tendance à l’intégration de tous les garages dans de grands groupes. En Belgique, nous sommes passés de vingt distributeurs Porsche en 1986 à neuf aujourd’hui. »

Lean and clean

Au cours de ces dernières années, Philippe a eu l’impression de perdre son autonomie, ce qui l’a incité à réfléchir à l’avenir. Il a pris un nouveau CEO il y a deux ans. Et commencé à rechercher un éventuel repreneur dans la foulée. « J’avais déjà souvent été approché par des groupes étrangers, mais une vente n’était alors pas à l’ordre du jour. Je devais encore me faire à l’idée. Jusqu’à ce jour en 2021 où j’ai rencontré les responsables de D’Ieteren au Portugal. Ils ont sondé ma volonté de penser à eux au cas où je déciderais de vendre. Nous avons signé la première lettre d’intention en novembre 2022. La reprise a été finalisée en août 2024, après avoir obtenu l’accord de l’Autorité belge de la concurrence. »

L’accompagnement professionnel de Vandelanotte a grandement participé à l’impression positive que lui a laissée le processus de négociation et de vente. « J’étais déjà client chez Vandelanotte depuis une dizaine d’années. J’ai toujours entretenu d’excellents rapports avec Wim Dewulf, ma personne de contact. Il est malheureusement décédé cette année et j’ai encore du mal à m’y faire. Son credo était “lean and clean”. Je dois entre autres à cette approche d’avoir acquis une bonne crédibilité auprès des banques et fournisseurs, ce qui a évidemment aussi été une plus-value lors des négociations. Isabelle Semetier, désormais en charge de notre fiscalité, est tout aussi compétente. Elle connaît notre dossier sur le bout des doigts et son aide est très appréciée. »

Vandelanotte a accompagné Philippe à chaque étape du processus de vente : des entretiens de négociation aux conseils juridiques, en passant par le traitement administratif. Philippe a pu compter sur Veerle Buyl et quelques collègues de l’équipe M&A pour mener toute la transaction à bien de façon professionnelle. « Chaque équipe concernée possède l’expertise et le savoir-faire adéquats. L’ensemble du processus s’est déroulé en toute transparence et chaque question a trouvé une réponse, tout s’est donc passé de façon sereine et agréable. La reprise a donc été bénéfique à toutes les parties, aussi bien pour moi que pour le repreneur, le personnel et les clients. »

S’il a un conseil à donner à d’autres entrepreneurs, c’est de travailler avec des conseillers qui excellent dans leur domaine. « La fiscalité et la comptabilité forment la moelle épinière de chaque entreprise, mieux vaut ne pas sousestimer leur importance. La confiance est essentielle dans la collaboration. Avec Vandelanotte, j’ai toujours eu de très bonnes relations. Mon intuition et leurs chiffres se complétaient. »

L’histoire entre Philippe et Porsche est encore loin d’être terminée. « Au cours des prochaines années, je vais me consacrer à Porsche Exclusive Manufaktur (dédié au sur-mesure) et à Porsche Classics sous le nom de “Carrera Motors” avec l’un de mes deux fils et quelques collaborateurs. Ces activités auront lieu avec l’aval de Porsche AG et de DLP. Mon expérience de longue date m’a permis de forger d’excellents liens avec eux, ils me considèrent comme un ambassadeur de la marque. Le cordon ombilical ne sera donc pas coupé. »